Pénélope sur le bulletin du CEBF
Plusieurs d'entre-vous m'ont demandé de publier l'article que j'ai écrit pour le bulletin du CEBF au départ, je voulais le garder pour les adhérents mais finalement c'est aussi un hommage à une de mes chiennes donc les lecteurs de mon blog peuvent en profiter. C'est donc avec plaisir que je vous le donne. Ce n'est pas un chef d'oeuvre mais c'est ce que je ressens encore aujourd'hui.
Pénélope, mon Bouledogue
Douze ans. Pendant douze ans, ma petite bouledogue, Pénélope du Vidame d’Urfé a partagé non seulement ma vie mais celle de toute la famille. Douze ans c’est long car on a le temps de s’habituer au caractère, à la bouille et aux sautes d’humeur de notre compagnon. Douze ans c’est toujours trop court pourtant. Le seul défaut du chien est de vivre bien moins longtemps que son maître. Difficile aujourd’hui de passer à la suite, d’avoir un autre bouledogue. Je crois que Colette écrivait qu’elle avait eu des chiens et des bouledogues français. Comme je comprends cette phrase !
Comment le bouledogue vint à moi
Je me suis intéressé à la race par hasard et cela s’est fait en plusieurs temps. Le premier contact était plutôt brutal. Au milieu des années 90, j’avais vingt ans et c’est l’âge de toutes les audaces. J’avais donc ouvert à Roanne une boutique de matériel d’équitation. C’est une de mes cliente qui m’a fait approcher vraiment son bouledogue. J’en avais vu de loin en expositions et j’avais une amie éleveuse de cavaliers king Charles qui en possédait deux mais je ne les regardait que distraitement. Ma première impression fut la suivante : “Ce n’est pas possible une tête pareille ! C’est un montage ! Un cartoon !”. Et pourtant, en regardant de plus près, et à chaque visite de ma cliente, mon attirance pour ce drôle de chien se faisait plus forte encore que ma curiosité. Quelques temps plus tard, me voilà parti avec mes parents chez cette amie éleveuse qui avait deux boules. Je les approche et les observe donc avec plus d’attention et je suis séduit par la caille (à l’époque, le fauve était plus que rare), Griotte de Landouar. Une petite chienne douce et charmante qui venait volontiers chercher des calins alors que sa consoeur bringée préférait jouer avec ses compagnons canins. On peut dire qu’à chaque visite, Griotte venait se faire câliner et me familiarisait petit à petit avec le bouledogue français.
Environs deux ans après ce premier contact, je suis rentré, je ne me souviens plus comment, au comité d’exposition de Roanne et ainsi ai-je fait la connaissance de sa secrétaire, Marie-Claude Brun, qui, hasard des rencontres, élevait des boules à quelques rues de mes parents. Je suis donc allé lui rendre visite et voir ses chiens. C’est ainsi que je fis la connaissance de Basile, Doudou, Charlotte et surtout Faustine, une petite chienne un peu indépendante mais avec qui je me suis tout de suite bien entendu. L’entreprise de séduction avait marché, j’ai eu presque immédiatement envie qu’un bouledogue vienne partager ma vie.
Pénélope, petit jouet mais fort caractère
Il m’a fallu attendre janvier 1999 afin que la portée espérée naisse. Il y avait eu un suivi en amont. En effet, j’avais accompagné Marie-Claude, quelque deux mois auparavant à Villeurbanne pour que Labohème du Clos de la Charmoise, dite Charlotte, soit saillie par Ludo. Il avait fallu aussi espérer que des chiots verraient le jour et qu’une petite femelle me plairait. Ce fut chose faite. Deux bébés virent le jour. Perdican, un mâle mi-masqué et une toute petite femelle. Il me fallu alors lui trouver un nom. Marie-Claude préférait Prudence mais je n’étais pas très convaincu. J’ai longuement hésité. J’ai pensé à Polaire ou encore Pervenche mais ce fut Pénélope. Cela n’avait rien de très original mais c’est un prénom que j’ai toujours beaucoup aimé, allez savoir pourquoi. A l’époque, j’avais pas mal de temps donc, pendant les deux mois et demi durant lesquels je dus attendre que le petit monstre vienne à la maison, j’allai la voir, la photographier, la regarder pousser, ouvrir les yeux, faire ses premiers pas dans la maison puis dans le jardin. La petite chose évoluait tout à fait comme je voulais. Elle s’avérait espiègle, intéressante, curieuse mais aussi doté d’un fort tempérament ce qui ne serait pas toujours simple plus tard.
C’est donc en mars, à quelques jours de mon anniversaire que ce petit monstre vint rejoindre ma meute de cavaliers king Charles. Le moins que l’on puisse dire est qu’elle était différente des autres !
Pénélope a grandi sans encombre, sans même trop se défaire. Elle est restée, à l’âge adulte le “petit jouet” qu’elle était bébé. Vers huit mois, son caractère s’est affirmé encore un peu plus et j’ai du affronter un comportement auquel je ne m’attendais pas : Elle gardait son assiette jalousement mais refusait de manger. Je n’ai pas écouté les conseils du vétérinaire qui me suggérait de lui laisser ses croquettes un quart d’heure puis de les retirer et de recommencer l’opération jusqu’à ce qu’elle se décide à se nourrir. J’ai insisté et insisté encore pour qu’elle se remettre à consommer ses croquettes de manière régulière. Je n’ai pas trop mal réussi car quelques semaines plus tard, elle avait retrouvé son aspect tout rond et tout musclé.
Côté comportement, Pénélope était une dominante, une vraie ! Elle supportait difficilement les autres chiens et je devais être vigilant. A la maison, elle a fini par s’entendre avec les deux Cavaliers King Charles et même par partager, pour un temps au moins, leurs corbeilles. Cependant, les paniers et autres coussins étaient son domaine, elle les gardait jalousement et, parfois, délogeait l’une où l’autre qui avait eu l’outrecuidance de s’installer avant elle.
Les expositions
J’ai toujours aimé emmener mes chiens dans les expositions canines. J’avais donc choisi Pénélope un peu jolie afin de pouvoir la faire concourir. J’ai commencé très tôt afin de l’habituer au ring et les premières années, hormis quelques anicroches dues à son caractère affirmé, elle s’est plutôt bien comportée. De plus, elle était petite et courte mais c’était une chienne qui s’est vite révélée harmonieuse et dotée d’une locomotion très correcte. Les juges ne s’y sont pas trompés et elle a fait nombre de fois le meilleur jeune de sa race puis, plusieurs CACS et CACIB voire des meilleurs de race et même un meilleur du 9ème groupe à la Roche sur Foron sous le jugement de Madame Custot (CH).
En revanche, les deux championnats et les deux nationale d’élevage auxquels elle a participé ne lui ont pas apporté le succès escompté car elle est restée abonnée à une éternelle troisième place.
De plus, le plaisir partagé en expositions n’a été que de courte durée. Au bout de deux ans, elle me fit clairement comprendre que ce petit jeu ne l’amusait plus du tout. Elle commença à se présenter sur le ring avec les oreilles inclinées et une mine qui m’évoquait un peu une violette fanée ! J’étais tellement motivé que je refusais un peu de m’en rendre compte jusqu’à ce qu’un juge qui la connaissait bien ne me dise clairement quelque chose du style :
“Votre chienne est très jolie. Elle a bien gagné. Maintenant, elle en a assez, vous devriez arrêter.”
J’ai écouté et à Bourg en Bresse l’année suivante, alors que je tentais une dernière fois, le diagnostic s’est avéré exact. J’ai donc cessé les concours de beauté et Pénélope a retrouvé ses corbeilles et ses “copines”, enfin s’il on peut dire.
Les années qui suivirent
La belle a donc repris sa petite vie entre promenades tonitruantes et stages dans ses corbeilles gardées jalousement. Ce qu’il faut expliquer, c’est qu’elle n’aimait pas du tout se trouver en hauteur donc elle abandonnait aux autres très facilement les canapés et même mes genoux pour se créer un territoire bien à elle.
Pénélope est restée absolument parfaite pendant bien des années. Il m’était bien difficile de me rendre compte qu’elle avait vieilli. Jusqu’à l’âge de 11 ans, elle était une vraie bombe pour peu qu’on l’emmène promener à la campagne, ou, mieux encore, au bord de la mer où au moins d’un cours d’eau dont elle regardait les mouvements avec attention. Toute sa vie, elle a conservé aussi sa volonté de dominer les autres animaux et particulièrement les chiens. Je me devais d’y faire très attention afin qu’elle n’aille pas arracher une touffe de poil au setter du Monsieur ou au caniche de la Dame que je croisais en ville.
Ce ne fut que la dernière année que l’âge se fit sentir. Nous étions allés nous promener au bord du lac des Settons dans le Morvan et, si elle était toujours aussi jolie, je remarquais que de petits problèmes de santé liés à l’âge commençaient à apparaître. Quelques mois plus tard, elle perdit un peu d’énergie et un problème à l’oeil acheva de l’affaiblir. La douzième année fut plus difficile mais elle continuait à avoir plaisir à vivre près de moi et à manger et réagir lorsque je m’occupais d’elle.
Pénélope est partie brutalement le 30 août 2011, l’avant-dernier jour de mes vacances. Son coeur s’est arrêté alors qu’elle était en train de manger.
Depuis, j’ai le projet de reprendre un bouledogue français mais je n’ai pas encore franchi le pas. Cette petite chienne avait une telle personnalité que j’ai peur de comparer avec un compagnon qui viendrait rejoindre ma petite meute pour vivre de nouvelles aventures. Je pense à Pénélope très souvent et elle me manque. Je garde d’elle son caractère de cochon, son espièglerie et le plaisir que j’avais tout simplement à la regarder vivre.